Pourquoi tout le monde aurait-il besoin de ça ?

A quoi ça sert ? n’est-ce pas du nombrilisme ? Pourquoi tout le monde aurait-il besoin de ça ?

Quitte à ce que ce blog démarre lentement, et rame à se faire un peu de place entre mes patients, mon mari, mon fils et tout le reste, je vais commencer par un préliminaire fondamental : entendons nous bien : Non, je ne pense pas qu’une psychothérapie soit une indication a priori, de facto, pour tout le monde. Pour le dire autrement, je ne suis pas une ayatollah.

Non je ne pense pas qu’une psychothérapie d’orientation analytique soit une indication pour l’intégralité de la population mondiale ou même simplement occidentale ! Et il m’arrive régulièrement de dire à un nouveau patient que je pense que ce n’est pas le moment, ou que c’est le moment mais pas la bonne approche, ou encore que c’est le moment, l’approche mais pas la bonne thérapeute pour lui (il peut m’arriver de réorienter des personnes, parce que c’est un engagement mutuel et qu’on ne peut pas tout le temps s’engager avec tout le monde).

Il y a des personnalités à qui cela ne convient pas, pour qui cela est préférable de ne pas entamer un travail introspectif de fond, oui j’assume cette position. Ce n’est pas un rejet snob et idéalisant, sur le mode « vous n’avez pas les qualités requises pour », ce n’est pas inversement une dépréciation de ceux qui l’entreprennent évidemment. Mais dans la mesure où je ne suis pas communiste, je n’ai pas de plan quinquennal, ni de solution qui vaudrait pour tout le monde, car les solutions qui conviennent à tout le monde en général ne conviennent à personne si ce n’est à l’ego de ceux qui les ont décrétées.  Ça c’est fait.

Si donc une psychothérapie de « fond » ne convient pas à tout le monde, n’importe quand et avec n’importe qui, je persiste néanmoins : le connais-toi toi même socratique fait partie des fondements de notre civilisation. 

Et je ne peux, en tant que patiente et maintenant depuis plusieurs années comme thérapeute, que répéter ce que disent les personnes qui sont venues me voir à reculons, poussées par leur conjoint(e ), sommées par un proche, désarmées par une épreuve. « Je n’aime pas les psy, vous ne pouvez rien pour moi, je ne vois pas à quoi ça sert de parler, je connais déjà la situation. » et, quelques temps plus tard : « Je n’imaginais pas que ça me ferait autant de bien de parler ».

Que la parole soit cathartique, et que parler tout à fait librement à quelqu’un dont le jugement est suspendu et qui n’a pas d’enjeu affectif personnel dans la situation dont on lui parle, fasse du bien, vous en conviendrez aisément. Car ce que l’on me dit là, c’est que si la parole est libératrice, c’est parce qu’elle ne s’adresse pas à un mur. C’est parce qu’elle est dialogue, à partir d’une écoute, et que mise dans la relation à un autre dont c’est le métier, ce que l’on dit de soi devient bien plus éclairant.

En écrivant je me dis que ce blog est tout à fait dérisoire, tant c’est l’expérience que l’on en fait, dans la rencontre avec un thérapeute qui nous convient, qui peut modifier radicalement le regard que l’on avait a priori sur la démarche.

Alors à quoi ça sert ? A quoi ça sert de mieux se connaître ? A quoi ça sert de prendre une heure par semaine pour se poser, s’asseoir, faire taire le tumulte du monde et de nos actions, et dialoguer avec soi même ? Peut être que ça sert d’abord à ne pas se perdre en route, à reprendre du souffle.

On ne se demande pas à quoi ça sert de s’adapter aux exigences de base du monde extérieur, ni de notre corps. Parce que ça va de soi : ça permet de survivre. Ça ne permet pas de vivre bien. Ça permet de survivre. Pas encore d’exister. Laissez moi vous dire, chemin faisant, deux ou trois choses en faveur d’une meilleure connaissance de soi.

J’ai bien noté ce qui vous inquiète : n’est-ce pas du nombrilisme futile, et surtout, à quoi ça sert.

Le devoir maternel m’appelle mais je reprends la discussion asap, car la question est sérieuse, et mérite plus qu’un paragraphe.

 

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Cocktails et fonds de tiroir

« Puisque vous me posez la question », puisque je constate que mon travail de « psy » fait revenir, tel un leitmotiv, la même succession d’interrogations, parfois perplexes, parfois inquiètes, souvent, à juste titre d’ailleurs, agressives, et puisque d’un autre côté il y a longtemps que j’ai pris la plume, dans des publications, des articles ou des travaux divers, j’ai décidé de jeter sur la toile le début d’un dialogue.

Vos questions, mes réponses, et sans que je sache à l’avance où nous mènera la discussion, sans quoi je ne l’entamerai pas. Ce blog sera comme un terrain de jeu, journal de bord d’une psy décidée à faire d’une pierre deux coups si ça peut en intéresser certains que je réponde aux questions mille fois posées.

De mes sorties mondaines à mes fonds de tiroir remplis d’articles, de travaux inachevés, de publications datant de cette époque révolue où, n’étant pas mère, j’avais un peu de cette denrée si rare que l’on appelle « du temps », des questions d’étudiants aux inquiétudes des premiers rendez-vous, ce sont toujours les mêmes interrogations qui reviennent. Je vous livre donc des réponses, réponses de psy bien sûr, qui finissent toujours en ouverture sur une autre question… des réponses qui sont surtout là pour poursuivre la discussion, des réponses qui ne prétendent ni ne veulent rien clôturer définitivement, mais des réponses toutefois, pour nommer, situer, s’y retrouver.

Ma profession suscite une curiosité inquiète, presque une démangeaison, bien que la démarche soit très démocratisée, pour ne pas dire banalisée et dévoyée parfois.

Dans la nébuleuse « psy » comment s’y retrouver ? Le terme de psychothérapie est si vaste, qu’il en devient flou. D’où vos questions.

Ce dont je voudrais parler ici, c’est de ce que l’on pourrait peut-être appeler le « travail sur soi ». Drôle d’expression diront certains, nécessité qui s’appelle la vie et ne se limite ni ne se cantonne à un cabinet diront d’autres. Le travail sur soi, dans le fond, c’est ce qu’exige toute la vie, car si on s’arrête un instant pour regarder nos existences, dans leurs dédales intimes, on réalise que toute une vie suffit à peine pour se mettre vraiment au monde comme dirait joliment M. de Hennezel, tant la vie est perpétuel réajustement entre ce qui nous entoure et ce qui nous habite.

Je ne suis pas psychothérapeute par intérêt pour la psychologie plus que pour d’autres disciplines. Je suis psychothérapeute et cela a pour conséquence, par l’engagement avec des personnes dans leur triple dimension biologique, psychique et spirituelle, de convoquer l’anthropologie autant que l’humour, la philosophie autant que les neurosciences, le bon sens autant que la psychanalyse, la littérature fantastique autant que les questions les plus basiques d’hygiène de vie. en s’appuyant sur la psychiatrie quand nécessaire, la psychologie transgénérationnelle si cela s’impose, les dernières découvertes en neurosciences ou en endocrinologie lorsque une situation reste bloquée dans un cercle vicieux biologique, j’ai choisi que mon travail ne soit pas l’exercice d’une discipline fermée mais un espace ouvert pour dénouer des situations douloureuses et accompagner ceux qui me demandent de les aider pour franchir un cap, comprendre, avancer, se relever.

Car lorsque au cours d’un dîner ou d’une soirée, on m’interroge sur la psychothérapie, sur l’expérience que j’en ai comme patiente ou comme thérapeute, je ne peux que témoigner de l’insoupçonnable liberté intérieure et relationnelle que l’on gagne à s’octroyer cet espace-temps des séances. Ce lieu où l’on peut quitter clivages cartésiens et autres jugements tranchants. Des jugements qui ne sont pas faux parce qu’ils sont inexacts, mais parce qu’ils sont somme toute, bien réducteurs, plus aveuglants qu’éclairants.

Ces regards très incomplets sur nous-mêmes qui court-circuitent en fait l’intelligence de soi. Non que je crois à une omniscience de soi, ou à une exhaustivité mégalo de la thérapie ! Mais prendre ce temps, comme un suspens, un soupir, une plongée, une traversée des ombres, une reconnexion avec l’oublié de soi, permet de se familiariser avec soi-même, de se connaître, d’être tellement plus serein, dégagé, et du coup, bien plus efficace dans le monde extérieur, bien plus libres dans nos relations.

On acquiert spontanément, au fil des entretiens, un radar interne qui nous fait gagner beaucoup de temps (je vais vers ce qui me correspond, je fuis les parasites et ceux qui vont me faire rejouer les scénarios qui font mal).

Cela ouvre sur un lâcher-prise (et non pas un laisser aller) qui libère des questions stériles et encombrantes.

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